Extrêmes solutions

A l’heure où beaucoup rêvent du bipartisme états-unien, les partis « satellites » français se réorganisent et renouvellent leurs stratégies, notamment aux extrêmes. Des deux côtés de l’échiquier politique, les partis historiques éclatent et perdent peu à peu de leur influence. De ces crises internes, naissent de nouveaux mouvements fédérateurs. Le PC et le FN vont-ils devoir céder leur place à ces jeunes formations ? A droite comme à gauche, les nouveaux mouvements tentent de séduire respectivement les déçus du sarkozysme ou du socialisme. Le bilan de la première année de Sarkozy au pouvoir est assez catastrophique. Aux dernières municipales, la gauche a sûrement profité de l’impopularité du Président, mais aux prochaines élections, les Français pourraient bien se tourner vers ces nouveaux mouvements (fin du « vote utile » de 2007 ?). Des deux côtés, il s’agit pour l’instant de réfléchir à une stratégie politique et de ratisser le plus large possible.

 

Crise identitaire à l’extrême-droite

Le Paquebot coule : les rasés quittent le navire. Échecs électoraux répétés, siège historique vendu, fuite de « cerveaux ». C’est la banqueroute au FN. La nouvelle orientation « sociale et républicaine » de Marine Le Pen dérange les personnalités les plus radicales du parti. La « droite nationale » est en train de se reconstruire. Un mouvement vient de voir le jour.

Jean-François Touzé, ancien membre du bureau politique du FN vient de créer son propre « think tank », Convergences Nationales, avec Nicolas Bay, secrétaire général du MNR. L’homme veut aller plus loin. Une « instance de rassemblement et de mobilisation des énergies pour œuvrer à la refondation de la droite nationale, régionaliste et identitaire » vient de naître. Le mouvement est composé provisoirement de François Ferrier (président du groupe Identité et Tradition), Roland Hélie (directeur de la revue Synthèse nationale), Annick Martin (vice-présidente du MNR), Yann Phélipeau (membre du Bureau national du MNR), Robert Spieler (fondateur d’Alsace d’Abord) et de Jean-François Touzé.

Pour le moment, il rassemble surtout des déçus du Front National. Après une première réunion le 29 mars dernier à laquelle Bruno Mégret a participé, le mouvement a trouvé son nom le 27 avril : Nouvelle droite populaire. Même si la NDP « n’a pas vocation à devenir un parti », le mouvement prépare déjà une convention nationale le 1er juin prochain. César est bientôt mort. Brutus attend de porter le coup fatal. Mégret récupérera-t-il les électeurs de Jean-Marie Le Pen ? La Nouvelle Droite Populaire pourrait servir de réservoir militant et idéologique au MNR.

Guerre idéologique fratricide

Tout comme en 1999, deux familles se déchirent. D’un côté, le Front National qui défend un État-Nation. De l’autre, la Nouvelle Droite Populaire est en faveur d’une Europe « blanche » composée de régions à forte identité. Si dans le passé, le FN avait récolté la quasi-totalité des électeurs, aujourd’hui, la donne a changé : Jean-Marie Le Pen est en fin de vie politique. En 2010, date du prochain congrès du FN, l’homme devrait céder sa place de président. La « princesse » Marine succédera-t-elle à son père ? Si tel était le cas, la ligne politique actuelle du parti se confirmerait. Les cadres frontistes ayant rejoint la NDP ne reviendraient pas.

En attendant, la frange de l’électorat traditionnel FN, happée par les sirènes du sarkozysme en mai dernier et déçue par l’action du chef de l’Etat, aurait désormais le choix entre deux formations s’il lui prenait l’envie de rentrer au bercail…

Poings levés contre la gauche-caviar

A gauche, même scénario ou presque. Six ans après sa première candidature aux présidentielles, Olivier Besancenot est devenu une figure montante de la scène politique française. Aujourd’hui, « le veau nourri sous la mère d’Alain Krivine », comme le décrit Alain Soral, marxiste passé au FN, est en train créer un parti fédérateur et anticapitaliste. Le petit facteur de Neuilly-sur-Seine, âgé de 34 ans, parlera même des inégalités sociales chez Drucker le 11 mai prochain. Le porte-parole de la LCR voit sa cote monter et est devenu en moins de dix ans le chouchou des médias.

Le PS se rapproche du centre

Un espace se crée à l’extrême-gauche. Le PS se tourne vers le centre. Ségolène Royal et Bertrand Delanoé, plus proches de François Bayrou que d’Arlette Laguiller, sont les favoris pour prendre la tête du parti. L’aile gauche du PS, notamment le courant fabiusien, n’adhère pas à cette ligne politique : une partie des militants pourrait donc fuir vers l’extrême-gauche. Le futur parti anticapitaliste qui naîtra des cendres de la LCR, a pour vocation d’accueillir les déçus du PS.

Reste le PC, en crise, lui aussi. Le parti organisera un congrès du 11 au 14 décembre 2008. S’alliera-t-il avec ses camarades trotskistes du NPA ? Tout dépendra du futur président. Marie-George Buffet ne souhaite pas voir disparaître le parti historique, surtout que le PCF peut se vanter de ses scores honorables aux dernières cantonales et législatives. La secrétaire nationale est dans une logique de gouvernement donc d’alliance avec le PS. Cette stratégie permet au parti de survivre mais selon certains militants, « c’est de la prostitution : un parti antilibéral ne doit pas faire alliance avec un parti qui défend une économie de marché. Ceux-là pourraient aussi se retrouver dans le NPA.

NPA, toile d’araignée anticapitaliste

Hasard du calendrier ou pas, le Nouveau Parti Anticapitaliste devrait officiellement voir le jour en décembre. Il ne veut pas être une entité nationale basée à Paris avec un seul chef : il ne s’agit en aucun cas de recréer une LCR bis. Dès le mois prochain, deux nouveaux porte-paroles seront nommés. L’échec d’une seule candidature antilibérale aux dernières présidentielles le montre bien :. Il faut un organe pluriel qui rassemble mais qui respecte les différences de chaque mouvement. Un peu partout, des collectifs se forment. Composés pour la plupart de membres de la LCR, LO, d’associations altermondialistes comme ATTAC et même de militants communistes et socialistes. ces embryons du NPA s’organisent progressivement sous forme de toile sur tout le territoire, en se constituant en comités de quartier.

Pour le moment, il ne s’agit que de débattre afin d’échanger des idées. La LCR nomme cette phase « processus constituant ». Le premier embryon est apparu dans le Bas-Rhin à Mulhouse, il y a cinq mois. Déjà, deux comités de quartier ont vu le jour et un troisième est en train de se créer, des réunions ont lieu régulièrement.

Une autre force du NPA réside dans la jeunesse de ses militants. Ils appartiennent à la génération internet : ils animent des blogs, communiquent par emails et donc peuvent rester en contact entre eux, même à distance. Grâce à ces outils et au dynamisme de ses militants, le NPA pourrait remettre l’extrême-gauche sur le devant de l’échiquier politique dans les prochaines années. N’oublions pas que Besancenot était le cinquième homme aux dernières présidentielles, loin devant Buffet ou Bové.

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