Le vallon

Au bout d’une plaine lumineuse aux étendues sinueuses, gardée par deux collines jumelles, se cache une prairie d’herbes satinées. Une légère bise laisse apparaître en haut d’un ravin, une orchidée aux larges sépales blancs veinés de bleu violacé. Le rostelle écarlate surplombe le labelle oblong aux contours chiffonnés roses, sombre au centre. Les longues racines de la plante profondément enfouies dans le sol, semblent connectées à tous les éléments qui l’entourent. A peine le petit bec effleuré de la main, des gouttes d’eau perlent sur les feuilles des herbes de la prairie et la terre se met à trembler d’une légère secousse.

En contrebas, le ravin dissimule un vallon étroit. En le pénétrant, on y découvre une forêt tropicale chaude et humide. Dans cette atmosphère moite, le sol est si fertile qu’une pousse de goyavier peut devenir un bel arbre au tronc élancé en un éclair. Dans un creux formé par des racines, se lovent deux pythons à lèvres blanches. Sur une branche entourée de lianes, deux singes, l’un assis, l’autre à quatre pattes, s‘épouillent tout le corps. Au-dessus, deux perruches accolées, au corps rouge, croisent leurs becs blancs et déploient leurs ailes vertes et bleues. Au sol, un paradisier de Wahnes prépare la scène pour sa grande parade. Il va. Il vient. Encore et encore… jusqu’à ce qu’il ait retiré toutes les brindilles et les feuilles mortes de sa parcelle. Le volatile la décore alors avec quelques baies glanées par ci par là. C’est le moment de se donner en spectacle. L’oiseau aux yeux bleus étincelants se met à danser en gonflant son plumage d’un noir intense, comme un tutu, et exhibe son bouclier ventral jaune et vert. Dodelinement du corps, enchaînement de pas chassés, un coup à gauche, un coup à droite. Il exprime tout son art. Sa chorégraphie a séduit la femelle qui assiste au spectacle. Elle se rapproche et vient picorer les baies dispersées. Le mâle surexcité bat des ailes à vive allure. Il a gagné ses faveurs.

Au loin, résonnent grognements, gémissements et cris de joie. Soudain, le tronc du jeune goyavier se gorge de sève. Une source a jailli, et s’écoule dans le vallon, un torrent aux reflets nacrés. La grandeur végétale s’évanouit. Tout redevient paisible. Le soleil se couche sur la plaine. Une brume chaude apparaît dans le crépuscule derrière les collines.

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